Politique | Le Maroc connaît actuellement une importante vague de grèves et de manifestations syndicales. Cette mobilisation fait suite à l’adoption d’un projet de loi controversé sur le droit de grève, perçu par de nombreux syndicats comme une menace pour les droits des travailleurs. Face à ce qu’ils considèrent comme une pression accrue du Makhzen, les organisations syndicales appellent à une mobilisation générale.
Une mobilisation syndicale sans précédent
Les principales centrales syndicales marocaines ont lancé un appel à la grève générale pour les 5 et 6 février. Selon Miloudi Moukharik, secrétaire général de l’Union Marocaine du Travail (UMT), cette mobilisation est justifiée par la nécessité de protéger les acquis sociaux des travailleurs marocains. Les syndicats dénoncent notamment les atteintes au droit de grève et les pressions exercées sur les mouvements sociaux.
La Confédération Démocratique du Travail (CDT), l’Union Nationale du Travail au Maroc (UNTM), l’Organisation Démocratique du Travail (ODT) et le Front Social Démocratique (FSD) ont également annoncé leur participation à ce mouvement de protestation. Des marches régionales sont prévues dans tout le pays pour exprimer le mécontentement des travailleurs.
Un projet de loi au cœur de la contestation
Le projet de loi organique n°97.15, définissant les conditions et modalités d’exercice du droit de grève, cristallise les tensions entre le gouvernement et les syndicats. Adopté par la Chambre des représentants, ce texte est vivement critiqué par les organisations syndicales qui y voient une restriction importante du droit de grève.
Malgré les affirmations du gouvernement sur sa volonté de dialogue et de compromis, les syndicats estiment que la version du texte adoptée en commission à la Deuxième Chambre reste inacceptable. Ils appellent au retrait pur et simple du projet de loi et demandent au gouvernement de s’attaquer aux causes profondes des grèves, notamment en respectant le code du travail et en améliorant les conditions de travail.
Des manifestations devant le Parlement
La contestation s’est également manifestée dans la rue. Des dizaines de travailleurs marocains se sont rassemblés devant le Parlement pour exprimer leur rejet du projet de loi sur le droit de grève. Les manifestants ont brandi des pancartes et scandé des slogans dénonçant ce qu’ils perçoivent comme une atteinte à leurs droits fondamentaux.
Ces rassemblements témoignent de la détermination des syndicats à faire entendre leur voix et à peser dans le débat public. Ils illustrent également la tension croissante entre le mouvement syndical et les autorités marocaines.
Les positions se durcissent
Face à l’adoption du projet de loi par la Chambre des conseillers le 3 février, les syndicats ont décidé de durcir leur position. Ils appellent désormais à une marche nationale pour exprimer leur opposition au texte.
De son côté, le gouvernement, par la voix du ministre de l’Inclusion économique Younes Sekkouri, continue de défendre le projet de loi. Il affirme que le texte vise à encadrer le droit de grève sans le restreindre, et qu’il est le fruit d’un long processus de concertation avec les partenaires sociaux.
Un débat qui divise la société marocaine
La question du droit de grève ne se limite pas au seul dialogue entre syndicats et gouvernement. Elle suscite également des réactions au sein du patronat et de la société civile. La Confédération Générale des Entreprises du Maroc (CGEM) s’est ainsi insurgée contre ce qu’elle considère comme des pressions exercées sur le processus législatif.
Les petites et moyennes entreprises (PME) sont également concernées par ce débat. La Confédération marocaine des TPE-PME a exprimé son opposition au projet de loi, estimant qu’il pourrait avoir des conséquences néfastes sur l’activité économique du pays.
Vers un dialogue renouvelé ?
Face à cette situation tendue, certains acteurs appellent à un retour au dialogue. Le ministre Younes Sekkouri a ainsi intensifié les discussions avec les différentes parties prenantes pour tenter de trouver un terrain d’entente. Cependant, les positions semblent encore très éloignées et le chemin vers un consensus s’annonce long et difficile.
L’adoption définitive du projet de loi sur le droit de grève et ses modalités d’application restent donc des enjeux majeurs pour l’avenir des relations sociales au Maroc. La capacité du gouvernement et des syndicats à trouver un compromis sera déterminante pour l’évolution du climat social dans les mois à venir.