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Réforme de la Moudawana : vers l’éradication du patriarcat ou un compromis pour le féminisme ?

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Société | La réforme de la Moudawana au Maroc suscite de nombreux débats quant à son impact sur les droits des femmes. Entre avancées significatives et compromis, cette réforme du code de la famille interroge sur sa capacité à véritablement éradiquer le patriarcat ou s’il s’agit d’un simple compromis pour le féminisme. Examinons les principaux enjeux et changements apportés par cette réforme très attendue.

Les principaux changements apportés par la réforme

La nouvelle mouture de la Moudawana, présentée récemment à Rabat, apporte plusieurs modifications substantielles au code de la famille marocain. Parmi les points clés, on note l’élévation de l’âge légal du mariage à 18 ans pour les deux sexes, l’encadrement plus strict de la polygamie, ainsi que des avancées concernant l’héritage et les droits parentaux. Ces changements visent à renforcer l’égalité entre hommes et femmes au sein de la cellule familiale.

Le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, a détaillé les aspects essentiels de cette réforme lors d’une présentation officielle. Il a notamment insisté sur la volonté de moderniser le droit familial tout en respectant les préceptes de l’Islam et les spécificités culturelles marocaines. Cette approche équilibrée suscite des réactions contrastées au sein de la société civile et des mouvements féministes.

Un pas vers l’éradication du patriarcat ?

Pour de nombreux observateurs, cette réforme constitue une avancée significative dans la lutte contre les discriminations basées sur le genre. L’égalisation des droits parentaux et les restrictions apportées à la polygamie sont perçues comme des progrès tangibles vers une société plus égalitaire. Certaines associations féministes saluent ces changements comme une étape importante dans l’évolution des mentalités et des pratiques sociales.

Cependant, d’autres voix s’élèvent pour souligner les limites de cette réforme. Elles estiment que certains aspects du patriarcat demeurent ancrés dans le texte, notamment en ce qui concerne la tutelle matrimoniale ou les modalités de divorce. Ces critiques mettent en avant la nécessité d’aller plus loin pour véritablement éradiquer les inégalités de genre au sein de la société marocaine.

Un compromis pour le féminisme marocain ?

Le mouvement féministe marocain, qui milite depuis des décennies pour une refonte en profondeur du code de la famille, accueille cette réforme avec un mélange d’espoir et de prudence. Si certaines revendications historiques ont été entendues, d’autres restent en suspens. Cette situation alimente le débat sur la nature de cette réforme : s’agit-il d’une véritable avancée ou d’un compromis insuffisant ?

L’Union de l’Action Féminine (UAF), qui avait lancé une campagne pour le changement de la Moudawana dès les années 1990, salue les progrès réalisés tout en appelant à poursuivre les efforts. Cette position reflète le sentiment général au sein du mouvement féministe marocain : la réforme est perçue comme une étape positive, mais non comme un aboutissement.

Les réactions politiques et sociétales

Les réactions à cette réforme sont variées au sein de la classe politique et de la société civile marocaine. Le Parti du Progrès et du Socialisme a exprimé son soutien aux changements proposés, les qualifiant de « pas important vers l’égalité ». D’autres formations politiques et organisations de la société civile ont également fait entendre leur voix, illustrant la diversité des opinions sur cette question sensible.

Le Conseil supérieur des Oulémas, instance religieuse de référence au Maroc, a approuvé les grandes lignes de la réforme, comme l’a souligné le ministre des Habous et des Affaires islamiques, Ahmed Toufiq. Cette validation par les autorités religieuses est cruciale pour l’acceptation et la mise en œuvre effective des nouvelles dispositions.

Perspectives et défis pour l’avenir

La réforme de la Moudawana ouvre de nouvelles perspectives pour l’évolution du droit familial au Maroc. Le lancement de la phase législative, approuvé par le Roi Mohammed VI, marque le début d’un processus qui devra transformer ces propositions en lois effectives. Les défis à relever sont nombreux, tant sur le plan juridique que sociétal.

L’application concrète de ces nouvelles dispositions sur le terrain constituera un test crucial pour mesurer l’impact réel de cette réforme. La sensibilisation du public, la formation des professionnels du droit et l’accompagnement des familles seront des éléments clés pour garantir une mise en œuvre efficace et équitable de ces changements.

Pour approfondir le sujet, une analyse détaillée des enjeux de la réforme de la Moudawana est disponible dans cette thèse universitaire qui offre une perspective historique et sociologique sur l’évolution du droit familial au Maroc.

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